Affaire Claude Jean-Pierre : la famille reprend espoir hope
....
Les gendarmes témoins assistés
Les images de vidéosurveillance ont, elles aussi, fait l’objet d’interprétations. Diffusées sur les réseaux sociaux, elles ont ému la population et au-delà. « Nous ne sommes pas à l’origine de cette diffusion », a-t-elle souligné, rappelant au passage qu’en tant qu’avocats, ils sont tenus au secret de l’instruction. Mais la vidéosurveillance a le mérite d’exister et d’avoir été vue par des milliers de personnes. Après analyse des différents documents, et notamment du rapport de l’expert, le collectif a demandé au procureur de nommer un nouvel expert, estimant que celui désigné par le juge d’instruction n’avait pas été concluant, et que la pertinence de son analyse n’était pas prouvée. S’alignant sur la proposition du docteur Foucan qui avait réalisé l’autopsie, le collectif a proposé un collège d’experts extérieurs à la Guadeloupe, composé de professionnels : un neurologue et deux médecins - des urgences et en imagerie. Lors de ses réquisitions le 14 juin, le procureur de la République accédait à la demande du collectif et déclarait les deux gendarmes mis en cause dans cette affaire, sous le statut de témoins assistés. « Ils ont un statut hybride, a poursuivi maître Aristide, entre simples témoins et mis en examen. Le procureur a estimé qu’il y avait des éléments qui permettaient de les placer sous ce statut, qui peut basculer à tout moment. Ce que nous voudrions, c’est qu’ils soient réellement mis en examen. Nous pourrions alors avoir un débat contradictoire et donc leur poser des questions ». Même si les gendarmes sont sous le statut de témoins assistés, ils bénéficient selon la loi de la présomption d’innocence.
Un banal contrôle routier
Claude Jean-Pierre, 70 ans, est arrêté le 21 novembre 2020 au bourg de Deshaies par la gendarmerie pour un banal contrôle. Après ce contrôle, transporté au CHU, il meurt le 3 décembre. L’autopsie est pratiquée le 8 décembre. Deux jours plus tard, le procureur de la République fait un compte rendu. Le 5 janvier, les avocats ont accès à l’autopsie version papier, puis aux images de vidéosurveillance. Un collectif de six avocats de la famille Jean-Pierre se créée - composé de : Maritza Bernier, Sarah Aristide, Frantz Calvaire, Murielle Rodes et Evita Chevry -, constitué pour 16 parties civiles : sa fille, son gendre, ses frères et sœurs, nièces et ses belles sœurs.
Création du collectif Kont violans a jandam
Le 11 janvier, n’ayant aucun élément concernant l’enquête, plusieurs groupes nationalistes ont défilé dans les rues de Deshaies, réclamant la vérité sur les circonstances de la mort du septuagénaire. Ils créent le collectif Kont violans a jandam qui regroupe 16 organisations politiques, syndicales et associatives.
Statut de témoins assistés
Dans cette affaire, les avocats de la partie civile ont été entendus, en janvier, par la section de recherche. Dans le cadre d’une commission rogatoire, en avril, le juge a placé le chef patrouille de la gendarmerie et le gendarme qui ont procédé au contrôle sous le statut de témoins assistés.
Les images de la vidéosurveillance sur les réseaux sociaux
Le 20 mai, les images du contrôle routier de Claude Jean-Pierre sont diffusées sur les réseaux sociaux, créant une vive émotion du public. Celles-ci mettent en doute les propos selon lesquels le sexagénaire aurait résisté aux forces de l’ordre.
Une contre-expertise aura lieu
Le 14 juin, le juge d'instruction fait droit à la demande des avocats d'une contre-expertise et désigne un collège d'experts pour déterminer la cause du décès. Leur rapport devrait être remis fin novembre. Ils devront définir notamment quelle est la cause des lésions, les conditions du contrôle et les conditions d'extraction ? « Ceux-ci auront pour mission d'examiner tous les documents avec beaucoup de minutie », a souligné Frantz Calvaire, un des avocats.
En créole, Frantz Calvaire, membre du collectif, a insisté pour sa part sur « l’angle de tir. (...) Deux personnes peuvent voir une chose, mais chacune verra quelque chose de différent ; les émotions ne sont pas des arguments. Notre rôle, aujourd’hui, est de démontrer le lien de cause à effet, c’est ce que j’appelle l’angle de tir ». Pour illustrer ses propos, il a pris l’exemple d’une maison. Elle peut être en brique ou en bois vue de l’extérieur, mais, pour en avoir le cœur net, il faut entrer dans cette maison. Dans ce dossier, il estime que c’est la même chose. « Nous ne pouvons pas affirmer, à l’heure actuelle, pourquoi il est mort. Nous avons certes du ressenti, ce n’est pas suffisant. C’est vrai, nous sommes sur le chemin de la vérité et nous prendrons le temps qu’il faut, soyons patients ; nous devrons élaguer, écraser tout bois sec. Au pénal, vous devez démontrer la technique et l'aspect scientifique. Nous allons nous transformer en fourmis pour trouver les raisons de sa mort. Nous trouverons. Faites-nous confiance ». Maritza Bernier s’est interrogée sur les conditions d’extraction. « On voit, dans cette vidéo, le pied du gendarme sur la tête de Claude Jean-Pierre ; les conditions d’extraction des gendarmes à ce moment précis sont-elles conformes à leur règlement ? » L’avocate n’a pu s’empêcher d’évoquer l’affaire George Floyd.
Réagissez à cet article
Pour transmettre un commentaire, merci de vous identifier (ou de vous inscrire en 2min)
Aucun commentaire